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Procédure Pénale
mars 2019 ⁄ n° 335 ⁄ p. 14 ces plaintes sont déposées dans un service territorialement incompétent, celui-ci étant alors tenu de les transmettre
au service compétent. Bien mieux, dans un souci de gain de temps, cette démarche peut être précédée dorénavant
d'une pré-plainte en ligne s'agissant de certaines infractions (atteintes aux biens, discriminations diverses) dès lors
que l'auteur n'est pas identifié. La constitution de partie civile est pareillement facilitée, singulièrement dans les
procédures faisant l'objet d'un traitement en temps réel par le parquet (convocation par officier de police judiciaire,
convocation par procès-verbal, comparution immédiate). Les victimes peuvent à présent formuler dès le stade de l'en-
quête, avec l'accord du procureur de la République, une demande de dommages-intérêts qui vaudra constitution de
partie civile en certaines circonstances. Les demandes d'indemnisation ou de restitution de la victime recueillies par
procès-verbal ont ainsi la même valeur juridique que celles adressées par lettre recommandée avec avis de réception
ou par télécopie à la juridiction de jugement. Parallèlement, sont très sensiblement améliorées les conditions dans
lesquelles les victimes peuvent se constituer partie civile sans avoir besoin de se déplacer à l'audience. Elles peuvent
le faire vingt-quatre heures avant l'audience non seulement par lettre recommandée avec avis de réception, mais
également par télécopie et ce quel que soit le montant des dommages-intérêts demandés.
Par-delà la simplification des démarches des victimes, le législateur contemporain s'appuie également sur les nou-
velles technologies pour rationaliser les moyens de la justice et fluidifier la procédure pénale de la constatation des
infractions jusqu'à la phase de l'exécution des peines. À l'instar du procès-verbal à la volée, la pratique de la vidéo-
verbalisation permet ainsi de constater certaines infractions (limitativement énumérées par décret en Conseil d'État)
en matière de circulation routière sans arrestation du conducteur. À tous les stades du procès pénal (enquête, ins-
truction, jugement, exécution des peines), la vidéoconférence ou visioconférence permet, quant à elle, de procéder
à des interrogatoires ou à des auditions à distance (art. 706-71 C. pr. pén.). En évitant la comparution physique du
justiciable devant l'autorité judiciaire, le recours à la visioconférence réduit sensiblement les extractions judiciaires
et ses inconvénients en termes de coût de transport, de sûreté et de mobilisation des personnels concernés (admi-
nistration pénitentiaire, Police et Gendarmerie nationales). En complément de la perquisition classique emblématique
de toutes les séries policières télévisées, la cyber-perquisition permet désormais de collecter des données informa-
tiques à distance de la même manière que la géolocalisation vient aujourd'hui concurrencer la filature traditionnelle.
Grâce à la mise en place des Bureaux de l'Exécution des Peines (BEX) au sein des tribunaux de grande instance,
il est aujourd'hui possible de s'acquitter spontanément du paiement d'une amende dans la continuité immédiate de
l'audience pénale. En contrepartie de cette démarche volontaire, le condamné bénéficie d'une minoration s'il acquitte
le montant de la condamnation pécuniaire dans le délai d'un mois. Tout en contractualisant l'exécution de la peine, ce
nouveau dispositif améliore très sensiblement le taux de recouvrement des amendes pénales.
Enfin, l'effort de simplification initié par le législateur contemporain emprunte parfois le chemin de la suppression des
formalités inutiles ou redondantes, même si en ce domaine beaucoup reste encore à faire. En application du décret
n° 2016-1202 du 7 septembre 2016, les enquêteurs ont désormais la possibilité de déroger à la règle traditionnelle
« un acte, un procès-verbal » non seulement dans l'enquête préliminaire mais également dans le cadre de la flagrance.
En outre, plutôt que de dresser un procès-verbal distinct pour chacune des diligences accomplies pour l'exercice
des droits dans le cadre d'une garde à vue, les enquêteurs ont la faculté de s'en tenir à un procès-verbal récapitulatif
unique.
B – Vers de nouveaux soins palliatifs ?
Alors que les « Chantiers de la justice » engagés à l'automne 2017 avaient suscité beaucoup d'espoir en termes de
simplification procédurale, la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice adoptée définitivement
par le Parlement le 18 février 2019 (et actuellement examinée par les Sages de la rue de Montpensier) se limite
à quelques timides avancées très éloignées du choc de simplification réclamé par nombre de praticiens. Loin du
« Grand soir » et de la remise à plat de toute procédure pénale, la simplification poursuit donc sa politique des petits
pas en s'exprimant une nouvelle fois sous la forme d'un chapelet de mesures concrètes et pragmatiques sans véri-
table cohérence d'ensemble.
Certaines innovations de la loi ont pour finalité de faciliter l'accès à la justice. Relèvent notamment de cette catégorie la
possibilité offerte aux victimes de déposer plainte en ligne (selon des modalités à définir par décret, nouvel art. 15-3-1 C.
pr. pén.) ou bien encore de se constituer partie civile par voie dématérialisée (nouvel article 420-1 C. pr. pén.).
D'autres mesures de simplification s'attachent à réduire les excès de formalisme qui jalonnent les phases d'enquête
et d'instruction. Sont emblématiques de cette politique législative l'habilitation unique des officiers de police judiciaire
délivrée par le procureur général du premier lieu d'exercice (nouvel art. 16 C. pr. pén.) comme la suppression de
l'exigence d'une autorisation judiciaire se rapportant à l'extension de la compétence territoriale des officiers de police
judiciaire (nouvel art. 18 C. pr. pén.). Dans le même esprit d'allégement, la présence d'un officier de police judiciaire
sera à l'avenir facultative au moment des autopsies (les médecins légistes étant habilités à placer sous scellés les