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C OVID-19
juin 2020 ⁄ n° 340 ⁄ p. 12 La COVID-19
met en évidence les carences
de l’État employeur !
[Pierre DARTIGUES|
Trésorier national]
Le pays traverse l’une des pires crises sanitaires de son histoire contemporaine. Qui
aurait pu imaginer une telle situation il y a quelques mois seulement ? En trois mois,
près de 30 000 de nos concitoyens sont décédés de la COVID-19. Sur le fondement
des observations et connaissances des scientifiques, le gouvernement prenait
la décision d’instaurer le confinement de la population. À défaut de traitements
médicamenteux, seuls les gestes barrières et la distanciation physique sont de nature
à contenir la propagation du virus. Ces mesures s’imposent à tous, pour tous les actes
de la vie quotidienne et professionnelle.
Bien sûr, un confinement absolu et (art. L. 4121-1 du Code du travail) de délits non intentionnels qui pose le
total de tous était matériellement prendre « les mesures nécessaires principe de la responsabilité pénale
et humainement impossible. Il était pour assurer la sécurité et protéger des personnes qui, sans causer
vital de maintenir une continuité de la santé physique et mentale » de dommage direct, ont violé une
services pour assurer la logistique des agents. Il a une obligation de obligation prévue par la loi ou
des soins, celle de la sécurité résultat. Force est de constater, que commis une « faute caractérisée et
des personnes et des biens et l’État employeur a été défaillant ! qui exposait autrui à un risque
permettre l’accès alimentaire. Il faut d’une particulière gravité qu’elles ne
rendre hommage à celles et ceux Il n’a pas été en mesure de fournir pouvaient ignorer ».
qui se sont retrouvés en première les équipements nécessaires de
ligne, exposés au risque viral et qui protection. Les policiers, quels Dans une certaine mesure, cette
paient un lourd tribut : je pense aux que soient leurs missions et situation n’est pas sans rappeler les
personnels soignants, aux « petites services, ont manqué de masques, affaires de l’amiante ou du Médiator.
mains » des livreurs et caissières de gel, de gants. Certains ont Le risque juridique est réel.
des magasins alimentaires et bien payé leurs propres équipements Souvent responsables et rarement
évidemment à tous nos collègues professionnels de protection et de déclarés coupables, les employeurs
maintenus en poste et chargés de désinfection ! Ils sont restés en des secteurs privés et publics sont
faire respecter le confinement face poste, « désarmés » face au risque montés au créneau auprès des
parfois à des concitoyens irascibles. de contagion, et ont poursuivi assemblées et du gouvernement
Pour les forces de l’ordre, il n’y a leurs tâches de sécurisation, pour se prémunir d’éventuelles
pas l’option « télétravail »… constatations des infractions, inter- poursuites… Plusieurs dizaines de
pellations, auditions, découvertes nos concitoyens, familles de victimes
Malgré toutes les précautions, et manipulations de cadavres… ou victimes de la COVID-19, ont
le risque zéro n’existe pas. Les engagé des actions en justice
risques varient d’autant plus selon Circonstances aggravantes : auprès de la Cour de Justice de la
l’âge, la comorbidité éventuelle de des notes de service et autres République (CJR) dont l’issue reste
chacun et l’activité professionnelle. injonctions alambiquées, ont intimé incertaine.
Il s’agit alors de limiter les risques aux personnels de ne pas porter
de contagion par la prévention de masque, voire même de les Les confédérations syndicales
au travers de gestes barrières : retirer, lorsque certains étaient ont demandé au gouvernement
port du masque, distanciation parvenus à s’en procurer ! Exit l’inscription de la COVID-19 comme
physique, désinfection régulière le principe de précaution. À ce maladie professionnelle. Non pas
des équipements, etc. stade, la négligence et la faute qu’une telle inscription protège
inexcusable de l’employeur (et de la d’une contamination, mais il s’agissait
Comme tout employeur, l’employeur chaîne hiérarchique) sont avérées. pour les victimes de « faciliter » la
public doit faire preuve de Il tombe sous le coup de l’article prise en charge à 100 % des congés,
responsabilité. Il est tenu par la loi 121-3 du Code pénal relatif aux soins et éventuelles séquelles. Les