Pas de trêve estivale au ministère de l’Intérieur qui prépare la rentrée parlementaire et le budget… pas de trêve non plus pour le Syndicat des Cadres de la Sécurité Intérieure qui rappelle et actualise ses revendications essentielles dans un courrier au ministre, Manuel Valls :
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Paris, le 9 Juillet 2012
Monsieur le Ministre,
Alors que les discussions relatives au budget 2013 sont en cours, il me paraît opportun de vous rappeler nos constats et nos propositions en la matière. Avant tout, il est nécessaire de faire un point sur l’avancée des différents protocoles des corps et carrières mis en place depuis 2004.
Sur la déflation :
Depuis 1995, lorsque l’effectif des officiers dépassait les 18 000, notre organisation, majoritaire, a toujours été favorable à la déflation du corps afin de mieux les positionner.
Un des objectifs du protocole de 2004 était la déflation du corps de commandement à 9 000, et l’additionnel de 2007 l’a porté à 8 000 officiers. Dans le même temps, cette déflation devait s’accompagner, à enveloppe constante, à la fois d’une reconnaissance indiciaire de type A (indice brut 966) mais aussi indemnitaire.
Force est de constater et nous l’avons maintes fois réitéré, le rythme des départs permettant d’atteindre ces chiffres en 2014 a été considérablement ralenti par la loi sur le maintien en activité qui place encore aujourd’hui les effectifs réels à environ 10 200 officiers.
Afin de reprendre un rythme soutenu de déflation de notre corps, le SNOP-SCSI propose un plan d’aménagement des fins de carrières par la mise en œuvre de mesures incitatives :
– des officiers méritants et promouvables au grade de commandant ou à l’échelon fonctionnel, pourraient être promus avec la contrepartie de partir à la retraite dans les 6 mois qui suivent leur nomination.
– d’autres mesures sont à expertiser comme une loi de dégagement des cadres, des modalités spécifiques de liquidation de la pension…
Par ailleurs, la valorisation des parcours professionnels notamment au travers de bilans de compétences, permettrait la mobilité des agents vers d’autres administrations ou vers le secteur privé.
Au plan statutaire, indiciaire et indemnitaire :
Si pour les deux corps actifs de la Police Nationale, mais aussi ceux de la Gendarmerie Nationale, les objectifs indiciaires et indemnitaires sont toujours en cours, il n’en est rien pour le corps de commandement puisque la dernière revalorisation (966 à l’emploi fonctionnel) a pris fin le 1er janvier 2012. Cependant, la grille A type a fait l’objet récemment d’une réforme portant l’indice terminal à 1015 ou hors échelle lettre. En outre, pour la première fois, l’indice terminal du corps de commandement a décroché de l’indice terminal du premier grade de commissaire (échelon spécial 1015). Désormais, une adaptation est nécessaire.
Par ailleurs, il est à préciser que depuis plusieurs années, la présentation du budget regroupe le corps de commandement et celui de conception et de direction permettant ainsi de répartir les effets du protocole de 2009 des commissaires de police sur l’ensemble des effectifs officiers et commissaires. Vous noterez que cela ne dérange personne de présenter dans les comptes publics officiers et commissaires réunis sous une même appellation !
Cependant cette présentation masque la répartition réelle des budgets : dois-je rappeler ici que l’allocation de service pour un officier chef de service est de 743€ contre 1 062€ pour un commissaire occupant le même niveau de poste, que plus de 30 postes de chefs de service occupés par des officiers ne sont toujours pas attributaires de l’allocation de service malgré les engagements de vos prédécesseurs.
Nous ne pouvons que dénoncer la dérisoire augmentation de la prime de commandement validée par le protocole additionnel de 2007 en contrepartie de l’abandon des heures supplémentaires, puisque ce sont en moyenne, seulement, 87€ mensuels pour 75 % des officiers, majorés de 20 ou 40 % pour les 25 % restants. En outre, le passage en catégorie B des gradés et gardiens permet actuellement une forte revalorisation de leurs traitements qui génère une frustration parmi tous les officiers subissant de fortes contraintes opérationnelles sans compensation à hauteur de leur investissement.
L’IRP :
Dans la mesure où vous avez annoncé la fin de la culture du chiffre, qu’en est-il de la pérennité du système de bonification appliqué à l’IRP des commissaires de police ?
Un nouveau système de calcul des objectifs va-t-il être mis en place ?
La réponse à ces deux questions est fondamentale, puisque la DRCPN nous a proposé en 2011, la mise en place d’une IRP pour les officiers de police d’autant qu’une enveloppe budgétée, la même année, d’un million d’euros sur trois ans reste en suspens.
Nous avions dénoncé le faible nombre de postes difficiles (500) prévus pour les officiers alors que 250 avaient été identifiés en faveur des commissaires dans le cadre de leur protocole. Aussi, nous avions proposé pour augmenter le nombre de postes, de ramener la part performance à un point d’équilibre avec la part responsabilités permettant de valoriser et d’élargir cette dernière. Ce nouveau système doit être juste, équilibré et transparent ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui pour la modulation de la prime de commandement. La problématique de la fidélisation des officiers en ile de France, devra impérativement être traitée.
L’ISSP :
Il est à préciser que la parité de l’ISSP entre officiers de police et ceux de gendarmerie, a été considérée comme juste par tous les parlementaires rencontrés. Un alignement total de cette indemnité a été budgété pour les commandants de police au 1er juillet 2012 mais seulement la moitié pour les lieutenants et capitaines à la même date. Comme nous vous l’avons déjà dit, il est légitime que le rattrapage total puisse s’effectuer.
L’AVANCEMENT :
Le déroulement de carrière des officiers et des commissaires est une des sources de motivation des plus importantes. Aussi, nous restons très vigilants quant aux ratios promus/promouvables pour les années à venir afin qu’ils restent, à minima, à hauteur de ceux appliqués ces dernières années.
La PRE :
Comme vous le savez, la somme allouée à cette prime pour résultats exceptionnels est de 25 millions d’euros par an. Si les sommes attribuées au titre du collectif semblent acceptées, il n’en est pas de même pour la prime individuelle qui suscite des incompréhensions voire même des tensions au sein de nombreux services par manque de transparence. Comptez-vous pérenniser ce système ?
La scolarité des cadres repensée :
En cette période de tensions budgétaires, nous avons déjà eu l’occasion de vous présenter nos propositions qui vont dans le sens de réelles économies. Les deux écoles de cadres de la Police Nationale que sont l’ENSP et l’ENSOP ont été classées respectivement les deux premiers établissements les plus coûteux des grandes écoles de la Fonction Publique.
Il est évident qu’avec le recrutement à 110 cadres par an (40 + 70), le coût par élève a augmenté de manière exponentielle compte tenu de l’organisation de la formation. La création d’un nouvel établissement public ENSP au 1er janvier 2013 que vous n’avez pas remis en cause est une étape mais si des économies doivent être réellement réalisées, il faut aller plus loin.
Le site de formation continue de Gif sur Yvette étant programmé à la fermeture à juste titre vu son état de délabrement, il nous paraît judicieux de transformer le site actuel de Cannes-Ecluse en site de formation continue, dont les personnels unanimement reconnus, pourront aisément poursuivre leurs missions.
Bien entendu, la formation initiale devra se faire sur le seul site de Saint Cyr au Mont d’Or qui, avec une centaine d’élèves serait bien loin des 170 formés dans ce même lieu dans les années 80. Dès lors, le coût par élève diminuera de façon significative et le nouvel établissement public « ENSP » descendra dans le classement précité.
J’entends déjà des détracteurs dire que cela est infaisable car la capacité d’accueil du site s’avèrerait insuffisante dans l’hypothèse de recrutements de 200 à 300 cadres ! Cela n’arrivera pas si l’on sort d’un raisonnement désuet et si l’on intègre la nécessité de la mise en place d’un schéma hiérarchique prenant en compte l’exhaussement des niveaux de recrutement tant des gardiens que des officiers de police et les conséquences de la loi sur le maintien en activité.
Dès lors, les économies à réaliser sont multiples :
– un seul lieu de formation initiale pour des formations souvent similaires afin d’éviter ainsi les doublons,
– une durée de formation à adapter à la réalité du recrutement et de l’expérience des personnels. En effet, la durée de la scolarité pour les élèves issus du concours interne, de la VAP ou du choix, est de 18 mois à l’ENSOP et de 24 mois à l’ENSP, alors qu’elle n’est que de 6 mois s’agissant des officiers de l’armée, et des attachés. Il convient donc d’uniformiser à la baisse la durée de cette scolarité permettant ainsi de réaliser de réelles économies. Cette réforme permettrait d’augmenter le nombre des candidats au recrutement interne, puisque la perte d’indemnités et la durée de la scolarité dissuadent bon nombre d’entre eux.
Bien entendu, la suppression du concours externe de commissaire et le recrutement unique pour les cadres actifs au grade de lieutenant à BAC + 5 dans un futur corps de commandement et de direction accroitra ces économies…sans parler de la fluidité et de la cohérence que ce nouveau corps apportera à la chaîne hiérarchique et donc à au bon accomplissement des missions du service public.
Dans le contexte budgétaire contraint que nous connaissons, vous conviendrez que nos propositions demeurent pragmatiques, réalistes et réalisables. Il reste maintenant à les concrétiser en faisant preuve d’audace, d’imagination et d’ambition.
Soyez assuré, Monsieur le Ministre, de l’expression de ma haute considération.
Le Secrétaire Général,
Jean-Marc BAILLEUL
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