Mission Protection fonctionnelle :
des propositions innovantes soumises au ministre de l’Intérieur.
Ce vendredi 13 juillet, le conseiller d’État Mattias GUYOMAR, présentait à la parité syndicale de la police nationale, aux représentants de la gendarmerie, ainsi qu’aux représentants syndicaux de la magistrature, ses principales recommandations adressées au Ministre de l’Intérieur en réponse à la mission d’études engagée après l’affaire de Noisy le sec.
Ses conclusions reposaient sur un double constat :
– d’une part si le régime de la protection fonctionnelle est plutôt satisfaisant, le cadre juridique souffre de quelques insuffisances et des dysfonctionnements sont visibles dans l’application des mesures existantes ;
– d’autre part le besoin de reconnaissance des policiers placés en difficulté est bien réel, et le malaise dans la profession à cet égard est palpable.
La mission a donc tenté d’y répondre notamment sur :
– l’articulation entre procédure administrative et judiciaire ;
– l’usage des armes entre police et gendarmerie ;
– l’accompagnement médico-social.
Les réponses apportées s’inscrivent concrètement dans quatre formes possibles avec la volonté de proposer des mesures substantielles pour l’amélioration de la protection des policiers et gendarmes :
– statu quo si nécessaire ;
– proposition d’approfondissement des réponses ;
– modification de texte si besoin pour renforcer la protection des fonctionnaires au sens large ;
– préconisations de bonnes pratiques ;
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1- Sur la protection fonctionnelle
a) La mission préconise et souhaite le développement de “bonnes pratiques” par la mise en place :
Sur ce dernier point le SCSI rappelle qu’il a défendu la nécessaire implication du ministère de l’Intérieur sur la scène médiatique, tant pour objectiver les faits auprès de l’opinion publique que pour protéger la réputation de l’institution et de ses agents.
b) Concernant le fonctionnaire victime, la mission propose :
c) Lorsque le fonctionnaire est mis en cause, pour la mission il convient de :
Le SCSI qui œuvre sans relâche pour une meilleure défense des policiers confrontés à une mise en cause judiciaire, disciplinaire ou administrative, se félicite que ses revendications majeures trouvent ici un écho favorable et complètent les avancées qu’il avait déjà pu obtenir devant les juridictions administratives et par négociation avec le ministère de l’Intérieur.
d) Lorsque le Défenseur des droits est saisi, afin d’améliorer la procédure la mission préconise de :
e) La suspension de l’agent pendant une information judiciaire : la mission a reconnu que les suspensions prolongées du fait d’une limitation ou d’une interdiction judiciaire d’exercer ont des conséquences indéniables non seulement par la perte de revenus, mais sont aussi génératrices d’isolement psychologique, de sentiment d’inutilité, et qu’il n’existait à ce jour aucune alternative juridique pour réintégrer l’agent dans une activité réelle. L’agent se trouve alors dans une forme « d’ apesanteur administrative » inacceptable.
La mission suggère donc une modification de la loi sur le statut des fonctionnaires (ainsi que pour les militaires) afin qu’au plus tard dans un délai de 4 mois, mais le plutôt possible, l’administration se prononce sur l’avenir de l’agent et soit en mesure de lui proposer un reclassement dans un emploi compatible avec le Contrôle judiciaire, avec information au juge d’instruction.
Le SCSI ne peut qu’approuver cette recommandation qui répond directement à la problématique de l’affaire de Noisy-le-sec, et qu’il avait lui même proposée lors de son audition du 13 juin dernier.
2 – Sur l’usage des armes
Pour la mission la jurisprudence sur les conditions de la légitime défense, convergente et stabilisée, a bien dégagé les notions de :
Aussi, à la question « faut-il créer une présomption de légitime défense ? » la réponse de la mission est négative car :
Néanmoins la mission propose :
Même si l’effet concret d’une telle proposition peut paraître symbolique, elle constitue néanmoins une amélioration à l’aberration juridique dénoncée par le SCSI que la notion de légitime défense ne fait aucune référence à la qualité de représentant de l’ordre ni à l’emploi des armes.
Sur ce point encore le SCSI avait fait observer à la mission que « les armes » d’une manière générale, voire générique, étaient juridiquement toutes considérées au même plan pour ce qui est de leur usage ce qui interdisait quasiment toute utilisation « pro-active » de ces matériels en dehors de la notion de légitime défense. La notion « d’arme intermédiaire » dégagée par la mission pourrait donc ouvrir plus largement la voie à une approche différenciée des matériels et des conditions de leur emploi.
S’agissant de l’alignement des textes relatifs à l’usage des armes entre policiers et gendarmes, la mission n’a pas proposé de créer un nouveau cadre légal pour l’usage des armes dans la police alors qu’il existe dans le code de la défense pour les gendarmes. Le conseiller d’État estime que l’énumération des conditions dans lesquelles les gendarmes peuvent faire usage légal de leur arme n’est pas d’une efficacité juridique décisive puisque le juge ramène toujours l’appréciation de la situation à la légitime défense. De plus, le statut militaire des gendarmes et les caractéristiques de certaines missions dont ils ont la responsabilité justifie pour les membres de la mission, le maintien de ce cadre.
Le SCSI a regretté devant la mission qu’un statu quo persiste sur cette question essentielle.
En effet, au plan opérationnel la mutualisation de plusieurs services et missions conduit policiers et gendarmes à couvrir ensemble des évènements en étant confrontés au même moment à des situations critiques dans lesquelles ils devraient pouvoir réagir de façon identique.
On peut évoquer le cas, courant, d’un barrage routier sur lequel les militaires pourraient après sommations tirer sur un véhicule qui aurait déjà forcé le dispositif, alors que le policier s’il le faisait ne serait pas protégé par le même texte.
Quant aux missions militaires des gendarmes, il est à rappeler que selon la source même du budget, elles ne représentent qu’à peine 2 % de leurs missions totales.
En conclusion de ce point, le SCSI n’a jamais réclamé la création d’un nouveau cas de légitime défense, ni même l’alignement pour les policiers sur les textes de la gendarmerie, mais bien la création d’un nouveau cadre juridique d’emploi des armes protégeant uniformément policiers et gendarmes.
Nous attendons qu’une réflexion exhaustive et spécifique soit menée sur cette thématique au sein du Ministère.
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L’ensemble des préconisations de la mission devrait faire l’objet d’une publication rapide, à l’issue de laquelle nous souhaitons reprendre le dialogue avec le ministre de l’Intérieur pour amorcer au plus tôt possible une mise en œuvre concrète de celles qu’il aura décidé de retenir et, si possible, poursuivre la réflexion dans les champs insuffisamment investis.
Le bureau national
Tags: Conseil d'État, Sécurité